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Transparence dans la médecine des implants
Davantage de transparence grâce à SIRIS
Le rapport annuel 2019 du registre des implants SIRIS contient pour la première fois des informations permettant d’évaluer la qualité des implants de hanches et de genoux posés sur des patients, sur la base de données relatives à la révision de ces implants.
Fin 2018, l’enquête sur les implants (« implant files ») faisait la une de la presse internationale ; suite aux irrégularités découvertes en matière d’homologation et de surveillance des implants et des prothèses, des accusations parfois lourdes ont été adressées aux fabricants de dispositifs médicaux, aux médecins et aux autorités de surveillance. En Suisse aussi, des cas d’implants de hanches, de genoux et de rachis défectueux ou souillés, ayant entraîné des problèmes de santé parfois graves pour les patients concernés, ont été rapportés. Par la suite, SIRIS, la Fondation suisse pour l’assurance de qualité en médecine des implants, a profité de cette couverture médiatique : les recherches menées par le consortium de journalistes d’investigation ont donné une nouvelle impulsion quant à la nécessité de constituer un registre général des implants afin de faire évoluer la qualité.
Les valeurs statistiques « aberrantes »
Depuis 2012, SIRIS tient un registre de toutes les prothèses de hanches et de genoux posées en Suisse ; plus de 200 000 interventions ont ainsi été répertoriées et documentées jusqu’ici. Les données sont exploitées à des fins statistiques par le « SIRIS Scientific Advisory Board » en collaboration avec l’organisation SwissRDL de l’université de Berne, qui tient le registre. D’après le rapport annuel 20191 de SIRIS, une solide base de données permet désormais d’évaluer pour la première fois la qualité des implants, selon des règles précises, à l’aide des taux de révision2. Ces taux permettent de faire des déductions sur la qualité des produits implantés et des interventions chirurgicales. Durant la période de recensement comprise entre 2012 et 2018, douze implants ont présenté des valeurs aberrantes (outlier)3. Andreas Mischler, directeur de SIRIS, explique : « Nous savons quelle quantité de produits concernés ont été utilisés dans quelles cliniques pour quels patients – sexe, poids, état de santé – en quelle année. Nous connaissons les motifs de la révision tout comme les taux de révision des implants de même type. » Le « SIRIS Scientific Advisory Board » a recensé tous les cas en détail et fourni aux responsables de la qualité de chaque hôpital ainsi qu’aux responsables nationaux des fabricants un rapport sur les valeurs aberrantes contenant des recommandations d’actions appropriées. Il faut savoir qu’une valeur aberrante ne révèle pas forcément un implant problématique. Les raisons d’une intervention de révision peuvent tout aussi bien être liées au chirurgien ou à la prise en charge mais aussi à la responsabilité du patient.
Priorité à la qualité
Le rapport 2019 de SIRIS a suscité l’intérêt des médias. Intérêt qui a toutefois fait place à une certaine désillusion, comme le précise Andreas Mischler, car il n’existe pas de données concrètes sur les performances de chaque hôpital qui soient également compréhensibles pour le néophyte : « Pour le grand public, les données relatives à chaque hôpital sont représentées dans le rapport sous forme cryptée, uniquement par des points, mais la plupart des hôpitaux se situent actuellement dans la même plage (voir graphique). Toutefois, dès l’année prochaine, ce ne sera plus le cas, car nous publierons les taux de révision sur deux ans des implants de hanches et de genoux en indiquant le nom de la clinique concernée. A partir de 2020, « SIRIS Spine », une extension du registre aux implants de rachis, sera constitué dans le cadre du contrat qualité de l’Association nationale pour le développement de la qualité dans les hôpitaux et les cliniques (ANQ), des associations professionnelles médicales concernées et de la société européenne du rachis EUROSPINE. Les analyses continueront à être destinées en premier lieu à un public de professionnels. Elles sont censées fournir des indications précieuses aux chirurgiens, aux responsables de la qualité et aux fabricants en vue d’améliorer la qualité de leurs prestations. Les données seront discutées et comparées à l’échelle internationale, y compris d’ailleurs la raison pour laquelle le rapport SIRIS n’est disponible qu’en anglais. »
Devoir des fabricants
Les fabricants d’implants ont aussi un intérêt vital à ce que les données du registre soient fondées et probantes. Depuis des années, ils travaillent intensément à la mise en oeuvre d’un nouveau règlement de l’UE relatif aux dispositifs médicaux ainsi qu’à la constitution de la base de données européenne du dispositif médical (Eudamed) exploitée par les Etats membres de l’UE. Cette dernière permettra à l’avenir aux patients de se faire euxmêmes une idée de l’efficacité de l’implant proposé par le médecin. SIRIS, quant à lui, offre aux fabricants la possibilité de fournir des analyses de produits standardisées sur la base des données du registre. A l’avenir, plus aucun fabricant ne pourra se permettre de commercialiser des produits dont la qualité n’est pas documentée au moyen d’une solide base de données.
Instaurer une obligation à l’échelle nationale
Suite à la publication des « implant files » en 2018, les appels à la création, en Suisse, d’un registre national des implants qui recenserait toutes les disciplines médicales et analyserait de façon professionnelle la qualité des résultats se sont faits plus pressants. Une revendication légitime, comme l’estime également Andreas Mischler : « Pour que cela soit possible sans occasionner des frais et des efforts démesurés, un cadre uniforme doit être défini pour la saisie des données. Il doit inclure des aspects tels que l’accord et l’identité des patients ainsi que la possibilité de mettre en relation différentes sources de données (« linkage ») tout en assurant la protection des données. En outre, il serait intéressant de relever la qualité de vie du patient avant et après l’opération afin de mieux appréhender le bénéfice des opérations. Une telle initiative n’incombe pas aux seuls fournisseurs de prestations, mais relève également du devoir de l’Etat. Il est de sa responsabilité d’instaurer une obligation de tenir un registre à l’échelle nationale.