Detail
Ensemble contre la crise
Une lueur d’espoir grâce à la vaccination de masse
Restaurants et bistros fermés, stades sportifs déserts, télétravail et obligation de porter le masque: en Suisse, la vie publique est soumise depuis des semaines à de lourdes restrictions. Edictées par la Confédération et les cantons, les mesures draconiennes n’ont malheureusement pas apporté jusqu'à présent le succès escompté. Le nombre de nouvelles infections et le taux de reproduction sont encore trop élevés pour permettre un retour à la vie normale.
Toutefois, depuis le début de la campagne de vaccination massive en début d’année, une lueur d’espoir prometteuse naît à l’horizon. La Confédération a réservé 13 millions de dose de vaccin auprès de trois différents fabricants. Seule une petite partie a été livrée jusqu’ici. Il n’en demeure pas moins que les personnes particulièrement vulnérables peuvent se faire vacciner depuis janvier pour se protéger du virus potentiellement dangereux. D’ici cet été, le reste de la population qui le souhaite pourra également se faire vacciner. L’Office fédéral de la santé publique (OFSP) a communiqué cet objectif récemment. La vaccination est gratuite. Et bien que le financement soit pris en charge par l'assurance-maladie obligatoire (AOS), la franchise ne sera pas non plus prélevée.
santésuisse s’engage en faveur de centres de vaccinations...
Le fait que la campagne de vaccination nationale puisse être mise en œuvre de manière simple et non bureaucratique est aussi à mettre sur le compte des assureurs-maladie. Ils se sont opposés fermement en décembre dernier aux projets des cantons qui voulaient que les vaccinations soient proposées essentiellement dans les cabinets médicaux et les pharmacies. Pour Christof Kilchenmann, économiste en chef chez santésuisse, cela aurait été impossible car «les infrastructures ne le permettent tout simplement pas.»
Compte tenu de l’ampleur de la campagne, avec la vaccination prévue de 6 à 8 millions de personnes, la réalisation dans de grands centres garantit une bien meilleure efficacité. Cela a été démontré en 2009, lorsque la grippe porcine a tenu la Suisse en haleine. «Les cabinets médicaux peuvent tout au plus soutenir de telles actions, mais de manière ponctuelle», martèle Christof Kilchenmann. «Les centres de vaccination ont fait leurs preuves par le passé, ils sont bien plus efficients que de petites unités. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle cette solution est aussi retenue à l’étranger.» Par ailleurs, les critères pour la vaccination (qui peut être vacciné à quel moment) sont plus faciles à respecter dans un centre de vaccination. Si un médecin doit décider à qui c’est le tour d’être vacciné, cela peut conduire à des conflits d'intérêts éthiquement difficiles avec les patients.
...et de factures groupées
Les acteurs du système de santé ont également eu du mal à accepter d’autres éléments de la convention tarifaire. Les cantons ont longtemps défendu l’idée que les vaccinations devaient être facturées uniquement via l’AOS. «Cela aurait été extrêmement laborieux et aurait entraîné une charge de travail colossale pour tout le monde», explique Christof Kilchenmann. Au lieu de cela, il a préconisé, avec succès, un traitement simple avec des factures groupées similaires à celles de la campagne de vaccination contre la grippe porcine. En décembre, la Confédération, les cantons et les caisses-maladie se sont finalement mis d'accord sur la solution suivante:
· Les assureurs-maladie prennent en charge les coûts de la vaccination proprement dite, conformément au forfait de vaccination convenu, ainsi qu’un forfait de 5 francs par dose de vaccin.
· La Confédération assume les coûts dépassant les cinq francs par dose de vaccin ainsi que les coûts de transport et de distribution du vaccin dans les cantons.
· Les cantons prennent en charge les coûts de logistique, d’organisation et d’infrastructure sur leur territoire. Ils prennent également à leurs frais la quote-part afin que la population soit totalement exemptée d’une quelconque participation financière.
Un impact financier important pour les assureurs-maladie
Au total, les coûts à la charge des assureurs-maladie se monteront à environ 200 millions de francs. De plus, au moins 350 millions de francs également liés à la pandémie pour les tests, les traitements et les médicaments devront être déboursés. D’autres frais s’y ajouteront d’ici la fin de la crise.
Les réserves protègent en temps de crise
La pandémie de coronavirus laissera des traces importantes dans les comptes des assureurs-maladie. Il est d'autant plus important, surtout en ces temps difficiles, qu'ils disposent des fonds nécessaires pour faire face à des événements imprévus. Actuellement, leurs réserves s'élèvent à environ 10 milliards de francs suisses. Compte tenu du volume de l’AOS d'environ 33 milliards de francs, ces réserves sont solides, mais en aucun cas trop élevées. Elles correspondent à environ 3 à 4 mois de primes pour tous les citoyens suisses.
Or le Conseil fédéral veut réduire les réserves minimales des assureurs-maladie au beau milieu de cette crise. «C’est un projet imprudent et irresponsable», selon Verena Nold, directrice de santésuisse. Avec la modification prévue de l’Ordonnance sur la surveillance de l’assurance-maladie (OSAMal), la Confédération risque de créer un effet de yoyo néfaste tant socialement qu‘économiquement. «Si les primes ne sont pas adaptées à temps à l’évolution des coûts, ce retard devra être compensé l’année suivante – voire déjà en cours d’année – par des hausses de primes significatives.»
Des solutions constructives plutôt que des risques inutiles
Plutôt que de prendre des risques inutiles, le Conseil fédéral devrait au contraire, surtout par les temps qui courent, envoyer des signaux rassurants à la population et poursuivre sur la voie de la coopération dans laquelle il s’est engagé avec les assureurs et les cantons pour sortir progressivement de la crise. La principale étape a démarré en janvier 2021 avec le lancement de la campagne de vaccination. Il y a de bonnes chances que cette voie mène bientôt à la sortie de la pandémie et au retour à une nouvelle vie normale.