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Portrait: Ivan Glavas, responsable de négociations chez tarifsuisse
«Il faut de la ténacité, de l’habileté et de la diplomatie.»
Les négociations de prix entre fournisseurs de prestations et assureurs-maladie sont délicates. De grosses sommes d’argent sont en jeu, en particulier dans le domaine de l’assurance-maladie obligatoire. Des facteurs très différents sont déterminants pour le succès. Ivan Glavas, responsable de négociations chez tarifsuisse sa, ne le sait que trop bien. Voici son portrait.
Comment calcule-t-on le prix de base d’un traitement stationnaire dans un hôpital défini? Qui fixe la valeur du point tarifaire d’un médecin en pratique privée? Les responsables des négociations de tarifsuisse sa jouent un rôle décisif lorsqu’il s’agit de répondre à ces questions. La filiale de santésuisse assure l’achat de prestations pour plus de 40 assureurs-maladie et mène toutes les négociations de prix dans le domaine de la LAMal. infosantésuisse a voulu en savoir plus sur le travail d’un responsable de négociations. Sur quelle base et avec quels partenaires se déroulent les négociations? Comment calcule-t-on les prix? Que se passe-t-il si les négociations échouent? Nous avons interrogé Ivan Glavas, responsable de l’Achat des prestations de la «Région Centre» à Berne, qui dirige une équipe de plusieurs responsables des négociations.
La quadrature du cercle
Selon le dictionnaire, une négociation est «un échange de vues sur une question controversée dans le but d’aboutir à un accord». Et les négociations de prix dans le domaine de la LAMal sont toujours controversées. «Notre tâche consiste à concilier, dans un contexte de tensions multiples, les besoins extrêmement différents des payeurs de primes, des assureurs, des fournisseurs de prestations et des employeurs», explique Ivan Glavas. Autrement dit, les médecins en pratique privée, les hôpitaux ou les thérapeutes du domaine paramédical ont intérêt à vendre leurs prestations le plus cher possible. Pour tarifsuisse en revanche, le patient est au centre des préoccupations, raison pour laquelle ses collaborateurs mettent tout en œuvre pour acheter les prestations au meilleur prix. L’objectif étant de ne pas alourdir encore davantage la charge qui pèse sur les assurés. «Il est souvent très compliqué d’arriver à se mettre d’accord sur le juste prix d’une prestation» relève Ivan Glavas, «en particulier dans un environnement régi par la loi sur l’assurance maladie qui impose l’obligation de contracter.» Cela signifie que les assureurs ne peuvent pas choisir avec quels fournisseurs de prestations ils veulent collaborer.
Marchandage pour chaque franc?
Le département Achat de prestations de tarifsuisse gère actuellement environ 1000 conventions. Dans le domaine stationnaire, il négocie régulièrement les prix de base SwissDRG et TARPSY des hôpitaux et services psychiatriques ainsi que les forfaits journaliers des cliniques de réadaptation. Dans le domaine ambulatoire, il négocie la valeur du point tarifaire des médecins en pratique privée, des services hospitaliers ambulatoires et des fournisseurs de prestations paramédicales. Le responsable des négociations est-il donc une sorte de «marchandeur en chef» en matière de coûts de la santé? «Bien entendu, nous luttons pour chaque franc ou chaque centime en faveur des assureurs, et donc des payeurs de primes, afin de maîtriser les coûts.», précise Ivan Glavas. «Et bien entendu, les négociateurs, assureurs et fournisseurs de prestations sont parfois en désaccord. Rien de plus naturel dans un climat de fortes tensions où les positions des partenaires tarifaires sont souvent diamétralement opposées.» Afin que ces divergences ne s’aggravent pas et ne finissent par générer des blocages, un responsable de négociations doit non seulement très bien maîtriser son sujet mais aussi agir avec habileté. En plus d’une solide formation économique ou juridique, il lui faut une bonne dose de diplomatie et de ténacité pour arriver au but, précise Ivan Glavas. «Il est aussi très important d’avoir une certaine crédibilité afin que la négociation ne soit pas réduite à un vulgaire marchandage».
Base de négociation: les données sur les coûts et les prestations
On ne négocie pas dans le vide. Les données sur les coûts et les prestations, que chaque fournisseur de prestations ou son organisation faîtière doit mettre à disposition, servent de base à la fixation d’un prix entre partenaires tarifaires. Ces données sont soigneusement analysées, contrôlées quant à leur plausibilité et constituent les documents de base d’une négociation. Il appartient au responsable des négociations de développer, dans son domaine de compétence, une stratégie compatible avec les conditions régionales et nationales ainsi qu’avec les directives internes, lesquelles ont été élaborées en commun avec les clients de tarifsuisse, à savoir les assureurs-maladie. Durant les tractations proprement dites avec les fournisseurs de prestations, le responsable des négociations conduit une délégation dans laquelle les assureurs sont également représentés, en fonction de leur part de marché dans le domaine concerné. En intégrant les assureurs détenant la part de marché la plus élevée dans ces négociations, on augmente les chances que le résultat d’une négociation soit soutenu par tous les assureurs. Ivan Glavas: «Il va de soi que notre but est de satisfaire dans la même mesure les besoins des différents assureurs. Nous y parvenons souvent, mais pas toujours.» En principe, il suffit que le résultat de la négociation soit approuvé par la majorité des voix de la commission de négociation. Toutefois, si un assureur n’est pas d’accord avec le prix négocié, il peut retirer à tarifsuisse le pouvoir de négocier pour lui dans un domaine défini.
Et si plus rien de va?
Et que se passe-t-il si un processus de négociation est bloqué pendant des mois, si chaque partie campe sur ses positions et si les fronts se durcissent? «Il y a effectivement des situations où une solution ne peut être trouvée dans le délai imparti», précise Ivan Glavas. Dans un tel cas, la loi prévoit que le gouvernement cantonal concerné auditionne tous les intéressés et fixe ensuite lui-même un tarif. Les intéressés peuvent recourir contre cette décision gouvernementale auprès du Tribunal administratif fédéral. Mais, souligne Ivan Glavas, «un responsable de négociations fait tout ce qu’il peut pour ne recourir à la voie judiciaire, longue et coûteuse, que si les chances de gagner augmentent ainsi pour les assureurs».
Ivan Glavas, responsable de négociations chez tarifsuisse